ancien joueur de basket professionnel français,
médaille de bronze au championnat d’Europe 2005,
assistant coach à Paris Levallois

Durant les années 90, le foot était le sport favori des gamins de banlieue. Parlez-nous de votre découverte du basket.
J’avais beaucoup de copains à Sarcelles, Garges et environs. Je jouais au foot, mes idoles étaient Roger Milla, Yannick Noah etc. Puis à la préadolescence est arrivé un copain qui avait la chance de faire des allers/retours aux Etats-Unis. Il nous montrait des cassettes vidéo de basketteurs et j’ai accroché tout de suite. Je voulais faire comme les stars des Chicago Bulls, comme Jordan, être capable de faire des performances spectaculaires. Je suis devenu un “rat de gymnase” : trainant au gymnase tous les jours et m’entrainant jusqu’à la fermeture.

Comment avez-vous intégré le club de Levallois ?
Cela s’est passé à mes 15 ans environ, lors de leur stage de dé­couverte. J’étais curieux, sans crainte. Moustapha Sankho émer­geait et montrait l’exemple aux petits comme moi. Assez vite, de “Cadet”, je suis devenu “Espoir”. À l’instar de Joakim Noah et Tony Parker, j’ai eu la chance d’être coaché par un basketteur américain emblématique qui a beaucoup compté dans ma car­rière : Ron Stewart. Cet homme a insufflé de grandes valeurs aux gamins que nous étions : le sens de l’effort, l’observation, la rage de gagner, le travail personnel et collectif. Tous ceux qui ont suivi ses enseignements ont eu une belle carrière profession­nelle. On ne lâchait rien. Tant que le coup de sifflet final n’avait pas retenti, il fallait s’attendre à tout de notre part. Cela nous a valu le surnom « les cardiaques kids ».

La dernière médaille de l’équipe de France au Champion­nat d’Europe de Basket date de 1959. Or, vous remportez la médaille de bronze en 2005. Quelle a été la recette du succès selon vous ?
Bien sûr, il y a énormément de travail derrière une victoire. Mais l’état d’esprit y a joué pour beaucoup. Je crois que notre esprit fraternel et respectueux nous a marqué à vie. On faisait tout ensemble, l’émulation, le soutien et beaucoup, beaucoup, beaucoup de discussions. Quand vous regardez Tony Parker ou Boris Diaw, pour les plus connus, vous voyez qu’il y a un esprit de générosité. Nous avons tous développé cela en nous.

Comment êtes-vous devenu coach ?
Il y a d’abord eu une énorme blessure en 2005. J’ai réappris à marcher, puis courir et sauter. Parallèlement, une nouvelle méthode de management à l’américaine passant par des sta­tistiques et autres outils a bouleversé le cadre dans lequel j’évoluais. Le retour à l’humain se faisant sentir, j’ai joué dans les clubs de Pau, Strasbourg, Fos, Chalon, puis Denain. Là, j’y trouvais des espaces qui me correspondaient mieux.
Arrivé à la quarantaine, j’ai suivi une formation de coach car j’ai toujours une soif de partage. Alors quand le Levallois Spor­ting Club m’a contacté pour devenir assistant coach, j’étais fou de joie de revenir au club où tout a commencé pour moi. J’ai reçu des appels d’encouragement de mes comparses qui sont passés par là.

Parlez-nous de votre vision du basket d’aujourd’hui.
Dans le basket en général, les aides sont omniprésentes dé­sormais. Entre les outils statistiques, les spécialistes du corps qui arrêtent les joueurs alors qu’à notre époque nous jouions malgré les blessures légères et les outils vidéo omniprésents, tout est fait pour encadrer le joueur avec des éléments exté­rieurs. Mon rôle est de faire le lien entre leur esprit dans le jeu et ces éléments qui ne doivent pas fragiliser la volonté… Au niveau des relations entre joueurs, ma génération connaissait les virées en groupe après les entraînements. Les nouveaux re­partent souvent chacun dans leur coin et sont hyper-connec­tés, analysant les Facebook, Snap, Instagram… Sur le terrain, cela se ressent. Dans mon club, nous jouons la carte de l’hu­main d’abord. Nous ne nous en sortons pas trop mal lorsque l’on voit que nos jeunes évoluent bien : 60 % de changements et deux joueurs en équipe de France (Vincent Poirier et Louis Labeyrie). Pour finir, pour trouver la victoire, il faut travailler avec son esprit et être généreux !

 

By Médina KONÉ